Anne Blanc, infirmière de formation, est devenue maire puis députée de l’Aveyron. Elle raconte la politique en tant que femme. 

Anne Blanc s’est présentée en 2001, un mois avant les élections municipales de Naucelle. Elle confie : “Je ne me serais jamais présentée si j’avais su qu’on risquait d’être élus car je n’avais aucune connaissance et compétence particulière dans ce domaine. En plus, j’étais la plus jeune de la liste et j’étais une femme”. Son aventure dans la politique commença par hasard. Elle a fait deux mandats en tant que maire.  En 2008, elle prit la responsabilité de la communauté de communes. En 2015, elle devient conseillère départementale avec son binôme Jean Marie Piala.


Le rapport au pouvoir entre les deux sexes est différents explique la députée. Les femmes ne sont pas à la conquête de ce pouvoir mais si elles l’obtiennent, elles vont s’en servir pour une cause ou pour réaliser un projet. Globalement, l’homme se bat pour obtenir ce pouvoir pour assouvir sa reconnaissance individuelle. Anne Blanc commente “ Les femmes puisent cette reconnaissance à travers le fait de pouvoir mettre au monde des enfants. Le papa est tout de même indispensable, mais on a notre légitimité et notre reconnaissance à travers nos enfants”. Selon elle, c’est pour cela que les hommes sont plus attachés à ce pouvoir car ils ont l’impression sinon de ne plus exister.  

Anne Blanc a été confronté à des remarques habituelles concernant les femmes de la part des citoyens quand elle s’est présentée pour la première fois aux élections municipales en 1995.  N’étant pas habitués à voir des femmes prendre des responsabilités politiques, les habitants ont exprimé :  “Qu’est ce qu’elle vient faire là, elle a quatre enfants. Elle ferait mieux de rester chez elle à s’occuper de ses gosses”. Ces propos l’avaient agacées, elle a donc écrit un encart presse sur lequel elle explique que son mari lui aussi a des enfants mais que personne ne lui poserait la question de savoir s’il a le droit ou pas d’aller en politique.

Elle a plusieurs anecdotes dans son parcours dans la politique. Au début de sa carrière, elle raconte “Les élus ne me disaient pas bonjour car ils croyaient que j’étais une secrétaire. J’étais une jeune femme, je ne pouvais pas être une élue dans leur tête. Globalement, les égos sont surdimensionnés. Que je sois une politique ou une secrétaire, il faut dire bonjour.”

La députée travaille majoritairement avec des hommes. Durant une réunion à quatre dont trois hommes, ils vont parler entre eux. Elle dit : “C’est culturel, ils ne le font pas exprès même si c’est moi qui pourrais avoir le plus de compétence sur le sujet sur lequel on travaille. Donc, de temps en temps, je pique mais je fais attention car l’idée ce n’est pas de dévaloriser qui que ce soit.”

Selon elle, les femmes politique doivent faire leurs preuves et elles n’ont pas le droit à l’erreur. Néanmoins, les hommes sont déjà considérés, même s’ils ne sont pas compétents.  

“Les hommes auront plus tendance à donner de la fiabilité dans les propos que sont tenus par un homme que par une femme”

La députée a fait un constat chaque fois qu’elle a constitué sa liste pour les mandats locaux. Elle raconte que quand elle allait voir un homme, il se sentait flatté. Une femme au contraire va directement dire qu’elle ne se sent pas capable. Anne Blanc explique “ L’image perdure encore comme quoi la politique n’est faite que pour les hommes. Du coup, les femmes se disent qu’elles ne sont pas à leur place dans ce domaine, qu’elles ne sont pas compétentes pour cela.”

Cependant, il y a de nombreux avantages qu’une femme soit dans la politique, d’après elle. Elle aborde d’abord “ le pragmatisme”, le détachement qu’une femme a par rapport au pouvoir. La députée explique : “Nous sommes moins au service de notre réélection. Nous prenons la décision qui nous semble la meilleure pour le territoire même si cela déplait aux citoyens. Aujourd’hui je suis élue, je donne de mon temps et de mon énergie, j’essaie d’apporter quelque chose. Si les citoyens ne veulent pas me réélire ce n’est pas grave, j’aime plein d’autres choses dans la vie”.

Les femmes apportent de la sérénité durant les débats. Ce sont donc des discussions pragmatiques dans une ambiance posée, sans attaque frontale. 

“C’est la complémentarité entre les deux sexes qui est extrêmement enrichissante”

Dans l’assemblée parlementaire, la parité est presque présente. Anne Blanc est contre les règles obligatoires de parité sur le principe mais elle considère que si on ne les avait pas imposées, on n’aurait jamais permis à autant de femmes de s’engager. Elle pense que ce n’est pas encore gagné, même s’il y a eu de grandes évolutions. Elle précise “ Certes par exemple il y a 30 femmes maires en France, mais il ne faut pas faire une lecture comptable. Il faut regarder où elles se trouvent, et là on remarque qu’elles gèrent globalement les petits villages de 150 habitants alors que les hommes eux ce sont des villes allant de 150 000 à 300 000 habitants”

Céline Castan