Simon Massbaum, d’une voix douce et posée, raconte sa vie, son parcours et l’histoire des juifs. Son père est un survivant d’Auschwitz, ce qui n’est pas le cas du reste de sa famille. Habitant Rodez depuis près de 44 ans, Simon Massbaum se décrit comme un juif non pratiquant, ce qui ne l’a pas empêché d’être victime d’antisémitisme.
Retraité du BTP, Simon Massbaum s’occupe de nombreuses associations sur le déchirant passé des juifs. Il est notamment le représentant départemental du Conseil Représentatif des Institutions juives de France, une association laïque composée essentiellement de juifs, créée en 1943 sous l’égide du conseil national de la Résistance.
Simon Massbaum ne parle qu’en son nom. Ses nombreuses activités l’ont amené à connaître l’histoire des juifs et à se préoccuper de l’antisémitisme d’aujourd’hui. Si par le passé, ce racisme était plus que visible, l’actualité montre aujourd’hui que des gens sont encore victimes de violences dues à leur origine. Il est difficile de montrer sa judéité dans les banlieues, explique t-il, notamment à cause des conflits qui ont lieu au Moyen-Orient. Ce climat de tensions a été renforcé par des personnes pour qui « la notion de relativisme n’existe pas », c’est-à-dire par des gens qui ont intégré que le conflit judéo-palestinien est de la seule responsabilité des juifs. Il note aussi la présence d’une haine sociale : « Dans toute haine sociale, l’histoire nous a montré qu’il y a toujours un bouc-émissaire » ce qu’il a du mal à comprendre. Pour lui, il s’agit de la pire injustice. L’antisémitisme d’aujourd’hui, qui ressort à travers des textes, des interviews, des mots, ressemble “aux écrits de 1930”, même si il est interdit d’être antisémite en France. Un nouveau mot a donc été inventé : le sionisme. Monsieur Massbaum explique que les gens emploient ce mot sans réellement savoir ce qu’il signifie. Selon Libération, un sioniste est un individu qui désire ou soutient la création d’un état juif en Terre d’Israël, qui serait dans le futur l’Etat du peuple juif. L’anti-sionisme est une stratégie intellectuelle permettant de contourner la loi, mais tous ne sont pas antisémites, il ne faut pas pour autant généraliser, précise t-il.
Quand le représentant départemental du CRIF évoque son enfance, il raconte comment il a été touché par le regard que certains portaient aux juifs. Il illustre sa pensée en expliquant qu’il a reçu des propos injurieux à son encontre, comme “sale juif” par exemple. Monsieur Massbaum relate une histoire qui a marqué son enfance : il avait l’habitude de manger tous les midis chez une femme, qui était la mère d’un ami à lui. Un jour, elle lui a demandé son nom de famille et a découvert ses origines; suite à cela, il n’a plus été invité à manger chez elle.
Simon se décrit comme un provocateur qui pourrait porter la kippa sans peur dans certains quartiers pour observer la réaction des gens, mais il n’est pas sûr que l’expérience serait concluante puisque tout le monde le connaît. Pour lui, enlever la kippa n’enlevera pas l’antisémitisme : Mireille Knoll et Sarah Halimi ont été assassinées pour la seule raison qu’elles étaient juives, alors qu’elles ne portaient pas de signes distinctifs. Toutes les attaques dont les juifs sont victimes poussent environ 10% de ces derniers à partir en Israël, selon Marc Knobel, historien et directeur des études au CRIF. Les juifs de France sont reconnaissants envers la France, premier pays à reconnaître leur religion, ce qu’exprime le proverbe “Heureux qui comme Dieu vit en France”. Pour autant, beaucoup ont peur pour leur sécurité. Il cite aussi un écrivain journaliste juif austro-hongrois qui disait, en référence à l’affaire Dreyfus, qu’un pays où la moitié des habitants se bat pour les juifs, c’est le plus beau pays du monde. Simon Massbaum explique que la relation des juifs avec le judaïsme est très compliquée, et que son père lui a toujours dit “Sois un bon français, ne dis jamais à personne que tu es juif”.
Margaux COUDERC et Laurie BRUNNER
Photo libre de droit, ce n’est pas Simon Massbaum
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